L’Ademe révèle le potentiel des mobilités actives face à la décarbonation, la santé publique et l’économie
L’Ademe publie deux études mettant en évidence le potentiel des modes actifs pour décarboner la mobilité quotidienne, améliorer la qualité de l’air et générer des bénéfices économiques et sanitaires significatifs. Pour la première fois, l’impact économique et sanitaire de la marche sont quantifiés ainsi que le potentiel de la marche et du vélo pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Parmi les chiffres à retenir : 76 % des Français vivent à moins de 4 km d’un ensemble d’équipements essentiels (supermarché, collège, médecin, pharmacie, salle de sport, bibliothèque). En généralisant les meilleures pratiques observées actuellement, la part modale de la marche pourrait atteindre 31 %, contre 24 % aujourd’hui et celle du vélo 8 %, contre 3 % actuellement.
La première étude, « Contribution du développement de la marche et du vélo à la décarbonation et à l’amélioration de la qualité de l’air », révèle le potentiel de la marche et du vélo pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et améliorer la qualité de l’air à l’échelle nationale. Pour rappel, le secteur des transports est le premier contributeur aux émissions de gaz à effet de serre en France (environ 33 % en 2023) et la pollution de l’air entraîne 40 000 décès prématurés par an.
Cette démonstration se fait de plusieurs façons. La première d’entre elle consiste à se baser sur la généralisation des meilleures pratiques actuelles, observées sur certains territoires pionniers, à l’ensemble du territoire national. Concrètement, si tous les territoires se comportaient comme les territoires les plus avancés en France sur les mobilités actives, le vélo représenterait 4 % de part modale dans le rural (contre 2 % en 2019). Ce serait 5 % dans le périurbain (3 % en 2019) et 13 % en urbain (3 % en 2019), soit un total France de 8 % (3 % en 2019). Au global, le vélo et la marche représenteraient 7 % des km parcourus (contre 4 % en 2019) et les distances tous modes diminueraient de 11 %. De plus, avec de telles hypothèses, les distances parcourues au quotidien diminueraient de 11 % en moyenne sur l’ensemble du territoire.
Vers une mobilité active et une vie de proximité
Cette vision, fondée sur un retour à la proximité dans nos modes de vie, démontrée par une corrélation entre la baisse des distances parcourues et l’usage des modes actifs. L’étude confirme par ailleurs que l’usage des modes actifs et la baisse des distances parcourues sont des politiques favorables à des modes de vie plus ancrés dans la proximité, avec une analyse des enquêtes de mobilité démontrant que les personnes qui utilisent le vélo ou marchent le plus souvent fréquentent des équipements et services plus proches que la moyenne des Français, leur mode de vie s’adaptant à ce mode de déplacement. Les automobilistes réguliers parcourent en moyenne 40 km quotidiennement contre 16 km pour les non-automobilistes. 76 % des Français vivent déjà à moins de 4 km des équipements essentiels (que sont les commerces, les écoles, les médecins), une distance réalisable en 15 min à vélo environ. Dans le détail, cela concerne 99 % de la population en milieu urbain, 93 % en périurbain et 36 % en milieu rural. Concernant la marche, 70 % de la population en ville, 32 % dans le périurbain et 8 % dans le rural vit à moins d’1 km de ces équipements essentiels, une distance réalisable en 15 min à pied environ.
Une perspective prometteuse pour la réduction des émissions
L’Ademe le rappelle, de nombreuses boucles de déplacement peuvent se faire à vélo dans une journée. À partir de plusieurs hypothèses retenues (portant sur la longueur des déplacements, l’âge de la personne), l’agence de la transition écologique estime que la part modale du vélo peut atteindre 30 à 50 % des déplacements. Quant à la marche, sa part modale pourrait atteindre 31%, contre 24% aujourd’hui.
Les distances parcourues au quotidien diminueraient de 11% en moyenne sur l’ensemble du territoire. Parallèlement, les émissions de gaz à effet de serre et de polluants diminueraient ainsi de 15% pour l’ensemble de la mobilité locale, soit les déplacements de moins de 80 km, soit une économie de plus de 8 millions de tonnes de CO2 par an.
Par l’analyse de différents territoires d’étude, l’Ademe fait la démonstration qu’1 kilomètre réalisé à vélo ou à pied est venu remplacer entre 6 et 20km réalisés, majoritairement en voiture. Ainsi, écrit l’Ademe, « au-delà du report modal, les modes actifs contribuent à la baisse de de la demande de déplacement (nombre de km parcourus) ».
Contribution du développement de la marche et du vélo à la décarbonation
Cette étude de l’Ademe vise à évaluer le potentiel des modes actifs (marche et vélo) pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et améliorer la qualité de l’air à l’échelle nationale, en tenant compte des spécificités territoriales (urbain, périurbain, rural).
Une première méthode a été développée, basée sur la généralisation des meilleures pratiques actuelles, observées sur certains territoires pionniers, à l’ensemble du territoire national. Elle prend en compte également la réduction des distances induite par la progression des déplacements à pied et à vélo. Elle permet de quantifier l’évolution des parts modales de la marche et du vélo dans chaque type de territoire (rural, périurbain, urbain) et la réduction des émissions de gaz à effet de serre associée. Une deuxième approche établit un potentiel théorique de pratique du vélo beaucoup plus important : un modèle d’analyse des boucles de déplacement effectuées par les français a permis d’estimer un potentiel minimal de déplacements qui ne peuvent être réalisés autrement qu’en voiture et un potentiel maximal de déplacements réalisables à vélo.
Dans une seconde étude « Mobilité à pied et bilan socio-économique de la marche », l’Ademe quantifie pour la première fois l’impact économique et sanitaire de la marche. Dans cette étude, l’agence s’intéresse aux 3 formes de la marche : les déplacements à pied (pour aller travailler, à l’école, faire des achats, etc.), la marche loisir, randonnée et sport, la marche au sein des espaces privés. Elle révèle le potentiel économique et sanitaire significatif de l’augmentation des déplacements à pied, soulignant ainsi son rôle essentiel dans l’atteinte des objectifs environnementaux et sociétaux.
Chiffres clés :
- Au total, les Français marchent en moyenne 1h12 par jour, dont 12 minutes de déplacements à pied, 18 minutes de marche loisir, randonnée et sport et 42 minutes dans les espaces privés.
- Ils parcourent en moyenne 3,5 km à pied par jour, dont 0,8 km pour les déplacements à pied, 1,2 km pour la marche loisir, randonnée et sport et 1,5 km dans les espaces privés.
- L’impact net est estimé à 57 milliards d’euros par an, notamment grâce à l’efficience accrue des actifs (hausse de la productivité au travail) mais aussi à l’amélioration de leur santé.
Cette étude détaille les nombreux impacts économiques de la marche, ceux-ci étant très positifs : « le bénéfice brut (c’est-à-dire par rapport à une situation fictive sans marche) des 3 formes de marche cités ci-dessus est d’environ 300 milliards d’euros. Le bénéfice brut des seuls déplacements à pied s’établit à 130 milliards d’euros ».
Le bénéfice net des déplacements à pied, correspondant aux bénéfices des politiques en faveur des déplacements à pied dans les territoires, est quant à lui estimé à 57 milliards d’euros par an. Parmi les postes sur lesquels les impacts nets sont les plus positifs, on retrouve l’efficacité des actifs (productivité, réduction de l’absentéisme et du turn-over), estimée à 20 milliards d’euros par an, et l’amélioration de la santé, qui représente 17 milliards d’euros par an. Ces chiffres soulignent l’importance économique et sociale de la marche, bien au-delà de sa simple fonction de déplacement. Ce bénéfice pourrait par ailleurs s’accroître : si la part des déplacements à pied passait de 24 % (part modale actuelle) à 30 %, le bénéfice économique serait d’environ 35 milliards d’euros.
Cette publication offre de nombreuses données sur un grand nombre de thématiques (santé, commerce, budget des ménages, etc.). Pour n’en citer qu’une, prenons l’exemple de l’aménagement de la voirie : l’étude montre que « les déplacements à pied permettent de réduire l’espace de voirie et la part de cet espace attribuée à la voiture. Ajoutant à cela le fait que les trottoirs sont moins coûteux au mètre carré que les chaussées (coût d’aménagement et d’entretien), les déplacements à pied génèrent au total une économie nette de 7,5 milliards d’euros sur les aménagements de voirie et leur entretien pour les collectivités territoriales ».
Au travers de ces deux publications, l’Ademe rappelle des priorités partagées par le Réseau vélo et marche :
- Inclure davantage les 65-80 ans dans les politiques cyclables et marchables
- Le développement d’infrastructures piétonnes et cyclables partout, y compris en zones rurales et périurbaines
- Des politiques publiques favorisant la proximité (commerces, services, culture…)
- Une accessibilité du vélo pour tous et pour tous les usages (notamment l’accompagnement de personnes et le transport de charges), avec un soutien fort aux vélos électriques et cargos
Mobilité à pied et bilan socio-économique de la marche
La pratique de la marche est mal connue et imparfaitement analysée dans les grandes enquêtes de mobilité. La première partie de l’étude a quantifié la marche dans les déplacements (pour aller travailler, à l’école, faire des achats…), les loisirs, la randonnée et le sport et enfin dans les espaces privés (au domicile, sur le lieu de travail…). Au total, les Français marchent en moyenne 1h12 par jour, dont 12 minutes de déplacements à pied, 18 minutes de marche loisir, randonnée et sport et 42 minutes dans les espaces privés. La seconde partie de l’étude a estimé les impacts socio-économiques de la marche, sujet peu exploré à ce jour. Ces impacts sont très positifs pour la société dans son ensemble. Le bénéfice des politiques en faveur des déplacements à pied dans les territoires est estimé à 57 milliards d’euros. Les postes sur lesquels les impacts sont les plus élevés sont l’efficience des actifs en emploi (20 Md€) et la santé (17 Md€). Enfin, si la part des déplacements à pied passait de 24 % (part actuelle) à 30 %, le bénéfice économique supplémentaire serait d’environ 35 milliards d’euros.
Les chiffres clés à retenir des deux études
- 76% des Français vivent à moins de 4 km d’un ensemble d’équipements essentiels (supermarché, collège, médecin, pharmacie, salle de sport, bibliothèque).
- En généralisant les meilleures pratiques observées actuellement, la part modale de la marche pourrait atteindre 31%, contre 24% aujourd’hui et celle du vélo 8%, contre 3% actuellement.
- Les émissions de gaz à effet de serre seraient ainsi réduites de 15% pour la mobilité locale, avec un potentiel maximum de 31%, soit entre 8 et 17MtC02.
- Le bénéfice net des politiques publiques en faveur des déplacements à pied est estimé à environ
- Si la part des déplacements à pied passait de 24% à 30%, le bénéfice économique global supplémentaire serait d‘environ 35 milliards d’euros.