Plaidoyer
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Diffuser les modes actifs dans tous les territoires

Alors que les grandes villes connaissent une accélération spectaculaire des politiques modes actifs, la transition vers une France cyclable et marchable ne pourra se faire sans les territoires périurbains, ruraux ou sans se pencher sur les quartiers prioritaires. Face à la dépendance à la voiture individuelle et aux défis écologiques, sociaux et économiques, la marche et le vélo représentent des alternatives crédibles, peu coûteuses, inclusives et accessibles à tous.

Les territoires peu denses, des réalités multiples

« Ruraux », « périurbains », « périphériques », « campagnes »… les qualificatifs sont nombreux pour désigner ces territoires. Les définitions statistiques de l’INSEE varient, mais l’enjeu est universel : intégrer les mobilités actives dans des espaces de faible densité, de la commune isolée au département, en passant par les intercommunalités.

Ces territoires, loin d’être marginaux, concentrent une part importante de la population et continuent d’attirer de nouveaux habitants, souvent relégués en périphérie des grandes villes par les dynamiques foncières.

Proposer des alternatives à la voiture individuelle

Depuis les années 1970, l’urbanisation diffuse et la prédominance de la voiture ont modelé ces territoires alliant un fort taux de motorisation des ménages et une offre de transports collectifs limitée ou inexistante, avec des distances domicile-travail ou domicile-loisirs éclatées. Pourtant, près de la moitié des déplacements quotidiens font moins de 5 km dans les communes hors aires d’attraction des villes. La marche et le vélo, seuls ou en intermodalité (transports collectifs, covoiturage), offrent donc une réponse concrète.

De nombreuses collectivités peu denses expérimentent déjà des politiques cyclables ambitieuses, assurant un maillage cyclable et marchable continu, favorisant le développement de services dédiés, facilitant l’intermodalité et l’apprentissage du vélo. Mais les défis restent importants : manque d’infrastructures continues et sécurisées, discontinuités, coupures liées aux routes ou aux rivières, poids culturel de la voiture.

Comment et pourquoi le réseau agit 

Une thèse de recherche, menée par Lucille Morio avec la Communauté de communes Erdre et Gesvres (44) et le laboratoire Espaces et Sociétés (Nantes), analyse depuis janvier 2023 la mise en œuvre des politiques cyclables en territoires périurbains et ruraux. Ses résultats enrichissent le réseau en connaissances concrètes et opérationnelles.

Lancé dans le cadre du Plan vélo 2023-2027, l’appel à projets « Territoires cyclables » a pour objectif d’accompagner sur la durée des collectivités peu ou moyennement denses, engagées dans le développement ambitieux d’itinéraires cyclables, pour un total de 125 millions d’euros de crédits d’Etat sur six ans. En partenariat avec la DGITM, le Cerema, l’ADEME et la FUB, le Réseau vélo et marche les réunit et les anime au sein du Club des Territoires démonstrateurs.

Le sujet est régulièrement abordé en Club Départements et dans le cadre de son animation réseau. Le RVM suit et promeut l’innovation des collectivités sur les infrastructures hors agglomération (CVCB, plans de circulation) et accorde une attention particulière aux projets de requalification de voirie. Il contribue également à l’évolution de la doctrine technique dans le but de mieux refléter la réalité des collectivités et de favoriser un pragmatisme dans la mise en œuvre.

Rendre possible le développement du vélo en territoires peu denses

Quelles sont les spécificités et le potentiel de développement l’usage du vélo en territoires peu denses ? Ces territoires où vivent la moitié des français.es constituent un enjeu pour les mobilités actives.

Les expériences de collectivités adhérentes du Réseau enrichissent les indicateurs et l’état des lieux de l’usage du vélo dans ces zones à faible et moyenne densité dans lesquelles devrait vivre 56 % de la population métropolitaine à l’horizon 2030. Ce dossier dévoile les politiques menées dans les communautés de communes Erdre & Gesvres (Pays de la Loire) et du Pays de Lumbres (Hauts-de-France), dans les communes de Dainville (Hauts-de-France), Mios (Nouvelle-Aquitaine), Loos-en-Gohelle (Hauts-de-France) et sur le Pôle d’équilibre territorial et rural de Sélestat (Grand-Est).

 

Transformer durablement les quartiers prioritaires avec les mobilités actives

Le Réseau vélo et marche est engagé sur le sujet d’égalité face à la mobilité. Dans de nombreux territoires, les habitants renoncent à certains déplacements quotidiens, du fait de la complexité du trajet à effectuer ou de difficultés financières pour le réaliser. Cette précarité de mobilité a des conséquences concrètes sur l’accès à l’emploi, aux soins, à l’éducation, aux loisirs. C’est particulièrement le cas dans les quartiers politique de la ville, territoires urbains sur lesquels les pouvoirs publics concentrent localement des moyens en raison des difficultés socio-économiques qu’ils concentrent. Ces quartiers sont identifiés par un critère unique, le revenu par habitant (inférieur à 11 250 euros par an).

La motorisation des habitants y est faible : la part des personnes ne possédant pas le permis est de 2,25 à presque 3 fois supérieure comparée aux chiffres hors QPV selon les tailles d’unité urbaine.  À contrario, la part modale de la marche s’y élève à 45,7 % dans ces quartiers, contre 22 % en dehors selon la dernière Enquête mobilité des personnes (EMP 2019). Celle du vélo, elle, y est inférieure à la moyenne nationale : 1,9 % contre 2,8 %.  Les conditions de déplacement dans ces quartiers sont difficiles, du fait de l’existence de coupures urbaines linéaires (ferroviaire, fluviale, routière). Elles concernent 90 % des QPV existants.

Indicateur En QPV Hors QPV
Part modale de la marche 45,7 % 22 %
Part modale du vélo 1,9 % 2,8 %
Ménages sans voiture 44,6 % 18,5 %
Ménages sans vélo 83,6 % 66,8 %
Nombre moyen de vélos/ménage 0,2 0,6
Quartiers enclavés par une coupure urbaine 90 %

La marche est dominante, mais souvent subie. La pratique du vélo, elle, reste marginale, freinée par le coût d’acquisition ou le manque d’infrastructures adaptées et sécurisées.

Comment et pourquoi le Réseau agit

En 2023, avec le soutien de l’ANCT, le Réseau a réalisé un guide (à retrouver ci-dessous) à destination de tous les parti prenantes de la politique de la ville pour développer des actions en faveur des modes actifs. L’objectif est d’intégrer systématiquement la marche et le vélo dans les projets de renouvellement urbain, les contrats de ville et les dispositifs éducatifs et sociaux (cités éducatives, Quartiers d’été). Dans ce cadre, le Réseau participe au groupe de travail de l’ANRU sur les mobilités et accompagne l’USH dans ces travaux en lien avec le développement de leurs services vélo.

Comme porte-parole des collectivités et en tant que tête de réseau, le RVM positionne les modes actifs au cœur de ses échanges et de ces travaux pour en faire un fil conducteur entre urbanisme, santé, éducation, emploi et politique sociale. Les mobilités ne doivent plus être traitées comme un sujet isolé, mais comme un levier transversal de justice sociale. Dans ce cadre, le Réseau travaille avec des acteurs structurants de la politique de la ville et de l’insertion : l’ANCT, l’USH, l’ANRU, Chantier école, Wimoov et les centres de ressources politique de la ville.

En participant à la vie du Réseau vélo et marche – clubs, groupes de travail, échanges entre pairs – les collectivités et associations partagent leurs expériences, mutualisent leurs pratiques et construisent ensemble des solutions adaptées aux réalités des quartiers prioritaires.

A pied et à vélo dans les quartiers prioritaires

Le guide délivre des conseils, des exemples de terrain, des données nationales et des ressources pour agir localement en faveur des mobilités actives dans les quartiers de la politique de la ville (QPV). Dans ces quartiers, la population marche davantage et pédale moins qu’en dehors des QPV. Alors que la part modale de la marche s’élève à 45,7 % dans les quartiers de la politique de la ville contre 22% en dehors selon la dernière Enquête mobilité des personnes (EMP 2019), la part modale du vélo est inférieure à la moyenne nationale (1,9% contre 2,8%). Après un état des lieux des déplacements dans ces quartiers, la publication délivre des pistes en s’appuyant sur des initiatives déployées dans les territoires.